«La BCE doit tout mettre en œuvre pour éviter que les banques ne fassent faillite parce qu’elles ont mal géré leur risque de crédit», a déclaré Mihails Kozlovs, le Membre de la Cour responsable du rapport. «C’est indispensable, vu l’importance de la confiance dans le secteur bancaire et le climat économique dégradé.»
Les auditeurs estiment que les évaluations du risque de crédit et des contrôles des banques réalisées par la BCE étaient généralement de bonne qualité, en dépit de quelques lacunes. Il n’empêche qu’elle n’utilise ses outils et ses prérogatives en matière de surveillance ni pour s’assurer que les risques recensés sont intégralement couverts par des fonds propres supplémentaires, ni pour ordonner aux banques de mieux gérer leurs risques. Le changement intervenu en 2021 dans l’approche de la BCE pour calculer le montant de fonds propres qu’une banque doit détenir en sus du minimum réglementaire ne garantit pas une couverture appropriée des différents risques. De plus, cette approche n’a pas été appliquée de manière systématique. À titre d’exemple, la BCE n’a pas imposé d’exigences proportionnellement plus strictes aux banques plus exposées. Il n’existe donc pas de lien évident entre les risques et les exigences à satisfaire. En fait, dans le cas des banques les plus fragiles, elle a chaque fois opté pour des exigences situées dans le bas des fourchettes prédéfinies. À cela s’ajoute une incapacité de la BCE à durcir suffisamment les mesures prudentielles lorsque le risque de crédit est élevé et soutenu et que des faiblesses persistent dans les contrôles.
Les auditeurs pointent du doigt le manque de personnel affecté, tant par la BCE que par les autorités nationales, à la surveillance bancaire, et déplorent la longueur excessive du cycle de surveillance de 2021, qui a pu donner lieu à des évaluations obsolètes. En revanche, ils reconnaissent que depuis 2015, le volume de créances douteuses héritées du passé (c’est-à-dire antérieures à avril 2018) a diminué sous l’effet de plusieurs facteurs, parmi lesquels les actions de la BCE. Celle-ci n’a toutefois pas usé systématiquement de ses pouvoirs de surveillance lorsqu’une banque ne disposait pas de processus et de données solides pour repérer et quantifier les prêts non performants.
Contexte
La BCE surveille directement les banques importantes de l’UE dans le cadre du mécanisme de surveillance unique, mis en place en 2014 en réaction aux crises financières de 2008. Ces banques, qui sont au nombre de 110, se situent dans les 20 pays de la zone euro et en Bulgarie. Elles détiennent ensemble près de 82 % des actifs bancaires de l’union bancaire. En 2021, les dépenses administratives relatives aux tâches de surveillance de la BCE se sont élevées à 577,5 millions d’euros. Les auditeurs ont centré leur attention sur le cycle de surveillance de 2021, avec notamment un échantillon de 10 banques présentant un niveau élevé de prêts non performants.Le rapport spécial 12/2023 «L’UE et la surveillance du risque de crédit des banques – La BCE a intensifié ses efforts, mais doit faire davantage pour une meilleure assurance que le risque de crédit est bien géré et couvert» est disponible sur le site internet de la Cour des comptes européenne (eca.europa.eu). Ce rapport s’ajoute à ceux déjà publiés par la Cour en 2016 et en 2018 sur les activités prudentielles de la BCE.