L’Indonésie a lancé en septembre dernier le Système d’information pour la prévention des catastrophes (DPIS). Lorsque l’agence météorologique nationale publie des informations d’urgence sur une catastrophe, comme un tsunami ou un tremblement de terre, le DPIS les transmet simultanément aux organisations de gestion des catastrophes et aux médias à l’échelle nationale afin de garantir la sécurité de la population. Avant la mise en place de ce système, l’Indonésie ne disposait pas d’une méthode adéquate pour transmettre des informations à sa population, ce qui constituait une préoccupation urgente. NTT DATA, une société japonaise leader dans les services informatiques, a été en charge de ce projet, de sa conception à son développement. Le DPIS s’appuie sur le savoir-faire du système japonais de partage d’informations sur les catastrophes L-Alert. En collaborant avec des ingénieurs indonésiens, les experts japonais ont permis de mettre au point un système adapté à la situation actuelle du pays. Ce projet s’inscrivait dans le cadre de l’Aide publique au développement (APD) du gouvernement japonais, dont l’objectif est de diffuser les technologies japonaises de gestion des catastrophes à l’étranger. Il s’agissait d’une première : jamais le système L-Alert n’avait été déployé hors du Japon.
Les partenariats entre le Japon et l’Asie du Sud-Est en matière de gestion des catastrophes ne datent pas d’hier. Par exemple, l’Agence japonaise de coopération internationale (JICA) travaille avec le gouvernement philippin depuis un demi-siècle sur des mesures de lutte contre les inondations. Parmi les projets phares, on peut citer les efforts de lutte contre les inondations le long du fleuve Pasig-Marikina, qui traverse le coeur de Manille. Ce projet est en cours depuis plus de 30 ans. L’augmentation des précipitations accroît chaque année le risque d’inondations dans la zone métropolitaine, où la population connaît une croissance rapide. Des prêts en yens accordés par le Japon ont servi au développement des infrastructures, comme l’amélioration du canal de dérivation de Manggahan — un affluent qui permet aux eaux de crue de la rivière Marikina de se déverser dans le lac Laguna — ainsi que des travaux de réparation sur la rivière Marikina elle-même. Ces aménagements contribuent à réduire les dégâts causés par les inondations le long du fleuve et à préserver les fonctions vitales de la ville. De fait, lors du passage du typhon Vamco (Ulysses) en 2020, on estime que les dégâts ont été fortement réduits grâce au canal de dérivation et aux travaux de réparations effectuées sur la rivière. Le Japon et les Philippines partagent des caractéristiques géographiques et démographiques similaires : 75 % du territoire japonais est montagneux et la moitié de la population vit le long de cours d’eau. Ceci est un exemple de la façon dont les mesures scientifiques de lutte contre les inondations développées par le Japon au fil des ans contribuent à atténuer les risques d’inondations aux Philippines.
Au Japon, plus de 5 000 personnes sont mortes ou ont disparu lors du typhon Isewan en 1959 (typhon Vera). Le grand tremblement de terre de Hanshin-Awaji en 1995 a fait plus de 6 000 victimes, avec nombre d’entre elles piégées sous les décombres. Ensuite, en 2011, le grand séisme de l’Est du Japon a provoqué un gigantesque tsunami qui a frappé plusieurs régions, faisant 18 000 morts ou disparus.
Les pays de l’Association des nations de l’Asie du Sud-Est (ASEAN) sont également régulièrement frappés par des catastrophes naturelles. Le tremblement de terre et le tsunami de 2004 dans l’océan Indien ont coûté la vie à 220 000 personnes dans les pays riverains. D’autres catastrophes naturelles ont causé des dégâts par la suite, comme le cyclone au Myanmar en 2008 et le super typhon Haiyan (Yolanda) aux Philippines en 2013. À ce jour, le Japon a fourni une aide diversifiée à plusieurs pays de l’ASEAN, notamment en matière de formulation de plans de gestion des catastrophes, d’amélioration des infrastructures et de formation des ressources humaines. Ces efforts se sont étendus au-delà de la coopération bilatérale au cours des dernières années. En octobre 2023, la JICA a signé un mémorandum avec le Centre de coordination de l’ASEAN pour l’assistance humanitaire en cas de catastrophe (Centre AHA) afin de promouvoir des efforts conjoints d’intervention en cas de sinistre. Le Centre AHA, établi à Jakarta, en Indonésie, en 2011, a pour mission de partager des informations relatives aux catastrophes entre les pays de l’ASEAN et de coordonner les secours d’urgence. La signature de ce mémorandum vise à renforcer les partenariats entre le Japon et l’ASEAN pour faire face aux catastrophes. Il contribuera au fonctionnement du système de gestion de l’information sur les catastrophes qui supervise l’ASEAN comme une seule région et à la construction d’un réseau de gestion des catastrophes.
Outre ces partenariats internationaux, le Japon intensifie également ses efforts d’exportation de technologies de gestion des catastrophes, sous l’impulsion conjointe des secteurs public et privé. Au Japon, la recherche et le développement sur la gestion et l’atténuation des catastrophes à l’aide de l’intelligence artificielle (IA) progressent. Par exemple, un système utilisant l’IA, plutôt que des personnes, est en cours de développement pour analyser automatiquement les données d’images satellites en cas de catastrophe et identifier instantanément les zones qui seront touchées. Ces systèmes en développement permettront d’extraire rapidement les données nécessaires aux collectivités locales pour prendre des décisions concernant les avis d’évacuation, aider à la prise de décision pour chacune des zones sinistrées et soutenir les directives d’évacuation. Une fois déployés, ils permettront de réduire les dégâts en amont et de contribuer à une reconstruction rapide.
Kimio Takeya, professeur spécialement nommé à l’Institut international de recherche sur les sciences des catastrophes de l’université du Tohoku, impliqué depuis de nombreuses années dans l’aide à la reconstruction post-catastrophe à travers le monde, souligne que : « De tous les pays développés, le Japon est le seul à s’être appuyé sur sa propre histoire en matière de catastrophes pour développer, corriger et affiner ses technologies de gestion des catastrophes. Nous les utilisons nous-mêmes, ce qui nous permet de les présenter avec confiance et de les voir utilisées à travers le monde. » Il fait remarquer que : « Parmi les catastrophes naturelles, les inondations causent les plus importants dommages économiques, et les tremblements de terre le plus grand nombre de morts, mais l’Europe et les États-Unis sont rarement confrontés à ces catastrophes. » Takeya explique que les pays asiatiques partagent certaines caractéristiques régionales : les populations se sont historiquement installées le long des fleuves pour cultiver du riz, ce qui explique l’emplacement actuel des villes et les rend vulnérables aux inondations, et les tremblements de terre sont également fréquents. Cela rend les technologies japonaises attrayantes, car elles ont été développées sur la base de l’expérience.
Takeya est reconnu comme une figure emblématique qui a fait du concept « Reconstruire en mieux » une norme mondiale dans le domaine de la gestion des catastrophes. Le concept encourage les gens à améliorer les contre-mesures pendant les efforts de reconstruction afin d’empêcher que des dommages similaires ne se reproduisent. L’investissement dans la préparation aux catastrophes est ce sur quoi Takeya insiste le plus aujourd’hui. Bien que les systèmes d’alerte précoce puissent sauver des vies, ils ne suffisent pas. Il souligne que les économies régionales ne doivent pas être détruites à plusieurs reprises. Il est important, ditil, que les dirigeants et les ministres des Finances de chaque pays prennent conscience qu’investir dans les mesures de prévention des inondations est bien moins coûteux que de couvrir les dégâts causés par les catastrophes lorsqu’aucune mesure préventive n’est en place.
Le 5 juin 2024, la réunion ministérielle sur la stratégie relative à l’exportation d’infrastructures et à la coopération économique s’est tenue dans la petite salle du deuxième étage de la résidence officielle du Premier ministre à Nagatacho, Tokyo. À cette occasion, le cadre de la Stratégie 2030 de promotion des systèmes d’infrastructure à l’étranger a été convenu. Cette stratégie vise à poursuivre l’expansion du Japon sur le marché mondial des infrastructures. Elle comprenait l’exportation de systèmes d’infrastructures de gestion des catastrophes. Le secrétaire général du Cabinet, Yoshimasa Hayashi, qui présidait la réunion, a résumé cette dernière en déclarant : « Les secteurs public et privé doivent dépasser les concepts d’infrastructure conventionnels et former des partenariats dans de nouveaux domaines afin de contribuer à la croissance durable de notre pays et du monde, tout en renforçant la présence des entreprises japonaises. »
La réunion ministérielle sur la stratégie relative à l’exportation d’infrastructures et à la coopération économique a été instaurée en 2013 par le gouvernement de Shinzo Abe de l’époque afin de soutenir l’expansion des entreprises japonaises sur le marché mondial des infrastructures. Cela coïncidait à la période où le gouvernement de Xi Jinping a commencé à s’engager activement dans la construction d’infrastructures dans les pays voisins et a lancé l’initiative de la « nouvelle route de la soie », qui vise à créer une vaste zone économique. Un fonctionnaire du gouvernement japonais, au fait de la situation à l’époque, a expliqué que « le gouvernement Abe avait alors décidé qu’il était nécessaire pour le Japon de contrer la Chine en devenant également une présence importante en Asie. » En renforçant les partenariats avec les pays de l’ASEAN à travers le BOSAI, le Japon entend non seulement contribuer à protéger la vie et les biens de nombreuses personnes contre les catastrophes, mais aussi renforcer ses partenariats économiques et diplomatiques.
Article d’Akio Yaita
Journaliste. Diplômé de la faculté des lettres de l’université de Keio.
Après avoir terminé son doctorat à l’Académie chinoise des sciences sociales, il a travaillé comme correspondant pour le Sankei Shimbun à Pékin et comme chef du bureau de Taipei. Auteur ou co-auteur de nombreux livres.
*Les articles et autres contenus ci-dessus sont fournis par JIJI.com ou AFPBBNews.
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Les partenariats entre le Japon et l’Asie du Sud-Est en matière de gestion des catastrophes ne datent pas d’hier. Par exemple, l’Agence japonaise de coopération internationale (JICA) travaille avec le gouvernement philippin depuis un demi-siècle sur des mesures de lutte contre les inondations. Parmi les projets phares, on peut citer les efforts de lutte contre les inondations le long du fleuve Pasig-Marikina, qui traverse le coeur de Manille. Ce projet est en cours depuis plus de 30 ans. L’augmentation des précipitations accroît chaque année le risque d’inondations dans la zone métropolitaine, où la population connaît une croissance rapide. Des prêts en yens accordés par le Japon ont servi au développement des infrastructures, comme l’amélioration du canal de dérivation de Manggahan — un affluent qui permet aux eaux de crue de la rivière Marikina de se déverser dans le lac Laguna — ainsi que des travaux de réparation sur la rivière Marikina elle-même. Ces aménagements contribuent à réduire les dégâts causés par les inondations le long du fleuve et à préserver les fonctions vitales de la ville. De fait, lors du passage du typhon Vamco (Ulysses) en 2020, on estime que les dégâts ont été fortement réduits grâce au canal de dérivation et aux travaux de réparations effectuées sur la rivière. Le Japon et les Philippines partagent des caractéristiques géographiques et démographiques similaires : 75 % du territoire japonais est montagneux et la moitié de la population vit le long de cours d’eau. Ceci est un exemple de la façon dont les mesures scientifiques de lutte contre les inondations développées par le Japon au fil des ans contribuent à atténuer les risques d’inondations aux Philippines.
Au Japon, plus de 5 000 personnes sont mortes ou ont disparu lors du typhon Isewan en 1959 (typhon Vera). Le grand tremblement de terre de Hanshin-Awaji en 1995 a fait plus de 6 000 victimes, avec nombre d’entre elles piégées sous les décombres. Ensuite, en 2011, le grand séisme de l’Est du Japon a provoqué un gigantesque tsunami qui a frappé plusieurs régions, faisant 18 000 morts ou disparus.
Les pays de l’Association des nations de l’Asie du Sud-Est (ASEAN) sont également régulièrement frappés par des catastrophes naturelles. Le tremblement de terre et le tsunami de 2004 dans l’océan Indien ont coûté la vie à 220 000 personnes dans les pays riverains. D’autres catastrophes naturelles ont causé des dégâts par la suite, comme le cyclone au Myanmar en 2008 et le super typhon Haiyan (Yolanda) aux Philippines en 2013. À ce jour, le Japon a fourni une aide diversifiée à plusieurs pays de l’ASEAN, notamment en matière de formulation de plans de gestion des catastrophes, d’amélioration des infrastructures et de formation des ressources humaines. Ces efforts se sont étendus au-delà de la coopération bilatérale au cours des dernières années. En octobre 2023, la JICA a signé un mémorandum avec le Centre de coordination de l’ASEAN pour l’assistance humanitaire en cas de catastrophe (Centre AHA) afin de promouvoir des efforts conjoints d’intervention en cas de sinistre. Le Centre AHA, établi à Jakarta, en Indonésie, en 2011, a pour mission de partager des informations relatives aux catastrophes entre les pays de l’ASEAN et de coordonner les secours d’urgence. La signature de ce mémorandum vise à renforcer les partenariats entre le Japon et l’ASEAN pour faire face aux catastrophes. Il contribuera au fonctionnement du système de gestion de l’information sur les catastrophes qui supervise l’ASEAN comme une seule région et à la construction d’un réseau de gestion des catastrophes.
Outre ces partenariats internationaux, le Japon intensifie également ses efforts d’exportation de technologies de gestion des catastrophes, sous l’impulsion conjointe des secteurs public et privé. Au Japon, la recherche et le développement sur la gestion et l’atténuation des catastrophes à l’aide de l’intelligence artificielle (IA) progressent. Par exemple, un système utilisant l’IA, plutôt que des personnes, est en cours de développement pour analyser automatiquement les données d’images satellites en cas de catastrophe et identifier instantanément les zones qui seront touchées. Ces systèmes en développement permettront d’extraire rapidement les données nécessaires aux collectivités locales pour prendre des décisions concernant les avis d’évacuation, aider à la prise de décision pour chacune des zones sinistrées et soutenir les directives d’évacuation. Une fois déployés, ils permettront de réduire les dégâts en amont et de contribuer à une reconstruction rapide.
Kimio Takeya, professeur spécialement nommé à l’Institut international de recherche sur les sciences des catastrophes de l’université du Tohoku, impliqué depuis de nombreuses années dans l’aide à la reconstruction post-catastrophe à travers le monde, souligne que : « De tous les pays développés, le Japon est le seul à s’être appuyé sur sa propre histoire en matière de catastrophes pour développer, corriger et affiner ses technologies de gestion des catastrophes. Nous les utilisons nous-mêmes, ce qui nous permet de les présenter avec confiance et de les voir utilisées à travers le monde. » Il fait remarquer que : « Parmi les catastrophes naturelles, les inondations causent les plus importants dommages économiques, et les tremblements de terre le plus grand nombre de morts, mais l’Europe et les États-Unis sont rarement confrontés à ces catastrophes. » Takeya explique que les pays asiatiques partagent certaines caractéristiques régionales : les populations se sont historiquement installées le long des fleuves pour cultiver du riz, ce qui explique l’emplacement actuel des villes et les rend vulnérables aux inondations, et les tremblements de terre sont également fréquents. Cela rend les technologies japonaises attrayantes, car elles ont été développées sur la base de l’expérience.
Takeya est reconnu comme une figure emblématique qui a fait du concept « Reconstruire en mieux » une norme mondiale dans le domaine de la gestion des catastrophes. Le concept encourage les gens à améliorer les contre-mesures pendant les efforts de reconstruction afin d’empêcher que des dommages similaires ne se reproduisent. L’investissement dans la préparation aux catastrophes est ce sur quoi Takeya insiste le plus aujourd’hui. Bien que les systèmes d’alerte précoce puissent sauver des vies, ils ne suffisent pas. Il souligne que les économies régionales ne doivent pas être détruites à plusieurs reprises. Il est important, ditil, que les dirigeants et les ministres des Finances de chaque pays prennent conscience qu’investir dans les mesures de prévention des inondations est bien moins coûteux que de couvrir les dégâts causés par les catastrophes lorsqu’aucune mesure préventive n’est en place.
Le 5 juin 2024, la réunion ministérielle sur la stratégie relative à l’exportation d’infrastructures et à la coopération économique s’est tenue dans la petite salle du deuxième étage de la résidence officielle du Premier ministre à Nagatacho, Tokyo. À cette occasion, le cadre de la Stratégie 2030 de promotion des systèmes d’infrastructure à l’étranger a été convenu. Cette stratégie vise à poursuivre l’expansion du Japon sur le marché mondial des infrastructures. Elle comprenait l’exportation de systèmes d’infrastructures de gestion des catastrophes. Le secrétaire général du Cabinet, Yoshimasa Hayashi, qui présidait la réunion, a résumé cette dernière en déclarant : « Les secteurs public et privé doivent dépasser les concepts d’infrastructure conventionnels et former des partenariats dans de nouveaux domaines afin de contribuer à la croissance durable de notre pays et du monde, tout en renforçant la présence des entreprises japonaises. »
La réunion ministérielle sur la stratégie relative à l’exportation d’infrastructures et à la coopération économique a été instaurée en 2013 par le gouvernement de Shinzo Abe de l’époque afin de soutenir l’expansion des entreprises japonaises sur le marché mondial des infrastructures. Cela coïncidait à la période où le gouvernement de Xi Jinping a commencé à s’engager activement dans la construction d’infrastructures dans les pays voisins et a lancé l’initiative de la « nouvelle route de la soie », qui vise à créer une vaste zone économique. Un fonctionnaire du gouvernement japonais, au fait de la situation à l’époque, a expliqué que « le gouvernement Abe avait alors décidé qu’il était nécessaire pour le Japon de contrer la Chine en devenant également une présence importante en Asie. » En renforçant les partenariats avec les pays de l’ASEAN à travers le BOSAI, le Japon entend non seulement contribuer à protéger la vie et les biens de nombreuses personnes contre les catastrophes, mais aussi renforcer ses partenariats économiques et diplomatiques.
Article d’Akio Yaita
Journaliste. Diplômé de la faculté des lettres de l’université de Keio.
Après avoir terminé son doctorat à l’Académie chinoise des sciences sociales, il a travaillé comme correspondant pour le Sankei Shimbun à Pékin et comme chef du bureau de Taipei. Auteur ou co-auteur de nombreux livres.
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