Les infections bactériennes sont la deuxième cause de décès dans le monde et le staphylocoque doré, Staphylococcus aureus, se classe parmi les bactéries les plus meurtrières. En 2019, le staphylocoque doré serait la cause de plus de 1 million de décès dans le monde et de plus de 16 000 en France, d’après une étude parue en 2022 dans
The Lancet. En France, il est l’un des principaux germes causant des infections nosocomiales et des intoxications alimentaires. Aujourd’hui les antibiotiques restent le traitement le plus efficace, mais certaines souches résistantes émergent, ce qui pose un risque d’impasse thérapeutique[1]. Dans ce contexte, une équipe de recherche d’INRAE, en collaboration avec le CEA et le CNRS, étudie depuis plusieurs années le staphylocoque doré et notamment comment il parvient à survivre dans le sang.
Le sang : un environnement hostile pour les bactéries
Le sang des mammifères contient des globules rouges, chargés de transporter l’oxygène. Ces cellules contiennent en grande quantité une molécule appelée hème qui sert notamment à fixer l’oxygène. Mais l’hème est toxique pour les bactéries ou les autres cellules s’il se retrouve hors des globules rouges. Or, si elles se retrouvent dans le sang, des bactéries pathogènes, comme le staphylocoque doré, provoquent une hémolyse, c’est-à-dire l’éclatement des globules rouges, et la libération de l’hème. Elles peuvent alors entrer en contact avec l’hème qui est toxique pour elles.
Les scientifiques ont découvert que le staphylocoque doré est capable de détecter l’hème grâce à un capteur spécifique baptisé HssS présent sur sa membrane. Lorsqu’il détecte l’hème, ce capteur déclenche un mécanisme de défense chez le staphylocoque doré qui synthétise une pompe d’efflux de l’hème, un mécanisme qui rejette l’hème hors de la bactérie. Cela crée une barrière protectrice lui permettant de survivre dans le sang et de progresser dans l’infection. Des expérimentations en laboratoire montrent que les staphylocoques dorés dépourvus du capteur HssS, et donc incapables de détecter l’hème, ont une virulence très affaiblie.
Une piste pour de nouvelles stratégies antibiotiques innovantes
Face aux enjeux de l’antibiorésistance, ces résultats ouvrent de nouvelles pistes de stratégies antibiotiques pour lutter contre le staphylocoque doré en recherchant des molécules inhibitrices du capteur HssS qui diminueraient sa virulence. De plus, le capteur HssS étant spécifique des bactéries pathogènes, les stratégies antibiotiques visant ce capteur seraient alors plus ciblées et n’affecteraient théoriquement pas d’autres bactéries bénéfiques à notre organisme, comme celles constituant le microbiote intestinal.
[1]
https://www.pasteur.fr/fr/centre-medical/fiches-maladies/staphylocoque
Référence
Saillant V. et al. HssS activation by membrane heme defines a paradigm for 2-component system signaling in Staphylococcus aureus. mBio, 29 April 2024, DOI:
https://doi.org/10.1128/mbio.00230-24
INRAE, l’Institut national de recherche pour l’agriculture, l’alimentation et l’environnement, est un acteur majeur de la
recherche et de l’innovation. L’institut rassemble une communauté de 12 000 personnes, avec 272 unités de
recherche, de service et d’expérimentation implantées dans 18 centres sur toute la France.
Institut de recherche finalisée, il se positionne parmi les tout premiers organismes de recherche au monde en sciences
agricoles et alimentaires, en sciences du végétal et de l’animal, et en écologie-environnement. Il est le premier
organisme de recherche mondial spécialisé sur l’ensemble « agriculture-alimentation-environnement ». INRAE a pour
ambition d’être un acteur clé des transitions nécessaires pour répondre aux grands enjeux mondiaux.
Face à l’augmentation de la population et au défi de la sécurité alimentaire, au dérèglement climatique, à la
raréfaction des ressources et au déclin de la biodiversité, l’institut a un rôle majeur pour construire des solutions et
accompagner la nécessaire accélération des transitions agricoles, alimentaires et environnementales.
À propos du CEA
Le rôle du CEA est d’éclairer la décision publique et de donner les moyens scientifiques et technologiques aux forces
vives (entreprises et collectivités), pour mieux maîtriser les mutations sociétales majeures : transition énergétique,
numérique, santé du futur, défense et sécurité globale. Il s’appuie notamment sur un socle de recherches
d’excellence, internationalement reconnues, pour faire avancer les connaissances et inspirer les ruptures à venir. Ses
20 000 collaborateurs travaillent au cœur des territoires dans 9 centres équipés de très grandes infrastructures de
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