L'administration Kishida s'attaque à un défi de longue date : convertir des milliers de milliards d’euros en espèces et dépôts bancaires détenus par les ménages japonais en investissements productifs générant des rendements financiers. Depuis janvier, le gouvernement a introduit un programme substantiel d'exonération fiscale pour les investisseurs particuliers. Il prévoit également de travailler à la déréglementation des entreprises de gestion d'actifs du pays, en y invitant des acteurs nationaux et étrangers.
Le but est d'établir un cercle vertueux où les finances des ménages s'orientent vers l'investissement productif, conduisant à une augmentation de la valeur de l'entreprise, à une hausse du revenu des ménages et par conséquent à une stimulation de l'investissement et la consommation. Le Premier ministre Kishida a souligné ces objectifs lors de son discours à la Diète du 30 janvier. Il a exposé des projets pour des réformes substantielles de la gouvernance d'entreprise et des améliorations de la capacité opérationnelle du secteur de la gestion d'actifs pour renforcer la chaîne d'investissement du Japon.
Une renaissance économique
Le total des actifs financiers des particuliers a atteint un record de 2 121 000 milliards de yens en septembre, soit une augmentation de 5,0 % par rapport à l'année précédente, selon la banque du Japon. Les espèces et dépôts ont augmenté de 1,2 % d'une année sur l'autre pour atteindre 1 113 000 milliards de yens, représentant ainsi 52,5 % de l'ensemble des actifs financiers.
Ce large volume de liquidités et de dépôts bancaires est lié à la tendance des ménages japonais à se fier aux espèces, tendance accrue par des taux d'intérêt et une inflation proches de zéro voire négatifs sur les trente dernières années.
La tendance semble cependant s’inverser : la moyenne des prix à la consommation de base au Japon a augmenté de 3,1 % en 2023 par rapport à l'année précédente, marquant la hausse la plus rapide en quarante-et-un ans, selon le ministère des Affaires Intérieures et des Communications.
« Nous visons à créer un cercle vertueux dans lequel les finances des ménages sont réorientées vers l'investissement et où l'augmentation de la valeur des entreprises entraîne de plus hauts revenus pour les foyers, engendrant plus d'investissement et de consommation », a déclaré Premier ministre à la Diète le 30 janvier.
« En plus de mener des réformes substantielles de la gouvernance d'entreprise, nous travaillerons à améliorer la capacité opérationnelle de l’industrie de gestion d'actifs et des propriétaires d'actifs, et à renforcer la chaîne d'investissement au Japon », a-t-il déclaré dans son discours d'orientation.
Des signes de dynamisme en faveur de l'investissement sur les marchés financiers ont d’ores et déjà été observés dans le pays. Le 22 février 2024, l'indice boursier de référence de Tokyo, le Nikkei 225, a battu le record jusqu'ici établi avant l'éclatement de la bulle spéculative en 1989.
Rendre le paysage commercial accessible aux entreprises étrangères
Dans le cadre de la « nouvelle forme de capitalisme » du Premier ministre Kishida, le gouvernement a publié son « plan politique pour promouvoir le Japon en tant que centre de gestion d'actifs de premier plan » afin de créer un « cercle vertueux de croissance et de distribution. »
« Nous nous emploierons à encourager une gestion d'actifs sophistiquée et à solliciter de nouveaux entrants », a déclaré le Premier ministre lors d'un discours à l'Economic Club de New York en septembre 2023. « Pour commencer, nous allons corriger les pratiques commerciales propres au Japon, résoudre les barrières à l'entrée et introduire un programme pour assister les nouveaux entrants. »
Une mesure clé permettant de surmonter les barrières à l'entrée et d'encourager les fournisseurs de services financiers étrangers et nationaux à se développer sur le marché japonais est l'établissement de zones spéciales pour les entreprises financières et de gestion d'actifs, où les procédures pourront être entièrement réalisées en anglais. Ce système de « zone spéciale » est déjà utilisé dans différentes parties du Japon, autorisant la déréglementation de certains secteurs comme les start-ups, l'agriculture ou encore les soins médicaux, avec pour but de stimuler la croissance économique.
Le gouvernement a de même accueilli avec succès la semaine de la « Japan Fintech Week 2024 » en mars 2024, événement inaugural tenu dans différents lieux du Japon, mettant en lumière le paysage dynamique de la Fintech japonaise à l’intention d'un public international.
L'événement, conjointement avec le FIN/SUM 2024 organisé par le gouvernement et Nikkei Inc, visait à catalyser les opportunités d'investissement et à favoriser la croissance continue de l'innovation dans le domaine de la Fintech. La « Japan Fintech Week 2025 » aura lieu du 3 au 7 mars 2025.
Une opportunité à plusieurs milliers de milliards d’euros
Lors d'un entretien mené par le Washington Post Creative Group pour un article commandité par le gouvernement japonais, Scott Nuttall et Joseph Bae, co-PDG du fonds d'investissement international KKR, et OKINA Yuri, experte en marchés financiers et en stratégies de croissance et présidente du groupe de réflexion privé The Japan Research Institute, se sont tous montrés optimistes à propos de l'avenir de l'économie japonaise.
« Nous pensons que le pays connaît actuellement une sorte de renaissance économique », a déclaré M. Nuttall.
« Le Japon représente une opportunité à plusieurs milliers de milliards d’euros », a déclaré Bae. « Les sociétés de gestion d'actifs qui comprennent parfaitement le marché, la culture et l'état d'esprit des investisseurs se préparent à jouer un rôle important à mesure que le Japon devient une destination de gestion d'actifs au poids grandissant sur la scène globale. »
Pour Mme Okina, c'est l'occasion d'être optimiste : « Dans un futur proche je pense que l'économie japonaise connaîtra une tendance à la croissance, en conformité avec cette stratégie de croissance », a-t-elle déclaré.
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